Le contrat d’engagement républicain est en place depuis maintenant un an. Très réservé au départ, le « mouvement associatif » n’a pas été convaincu par l’utilité de ce dispositif. Il vient tirer, lors d’une conférence de presse, le 26 janvier, un bilan très sévère et pointe les risques de dérives en ce qui concerne la liberté associative mais aussi l’autonomie des collectivités locales.
De quoi s’agit-il ? Le Contrat d’engagement républicain, (voir en savoir plus), à l’origine, avait pour objet de contribuer à la lutte contre le séparatisme et le terrorisme. A travers la signature de ces contrats par les associations, ou l’absence de signature, il aurait été possible de repérer celles qui refusent de porter les valeurs de la République. Un an après, force est de constater que le CER n’a permis de démanteler aucune cellule djiadiste.
En revanche, à travers la France, quelques préfets et élus ont pris prétexte de cette disposition légale pour refuser d’accorder des subventions ou de prêter des locaux ou alors demander d’annuler des aides à des associations qui, et ce n’est probablement pas un hasard, interviennent pour la plupart, dans le champ environnemental.
La situation est jugée suffisamment préoccupante par le « mouvement associatif » pour qu’il organise une conférence de presse le 26 janvier pour expliquer cette dérive et alerter élu-es et citoyen-nes.
Quelques exemples, à Lille, Poitiers, Chalon-sur-Saône et en Corrèze, permettent de justifier ces inquiétudes. En Corrèze, le préfet a menacé de supprimer une subvention accordée dans le cadre du fond d’aide à la vie associative.
Dans le Nord, à la demande du président du conseil régional des Hauts de France, le préfet a remis en cause le prêt d’une salle pour une réunion d’opposants à l’agrandissement de l’aéroport de Lille.
A Chalon-sur-Saône, le maire a pris prétexte de la loi pour refuser l’accès à l’espace public au planning familial. En effet, l’affiche qui annonçait la manifestation, voulant montrer que l’association militait pour toutes les femmes, sans discrimination, comportait, entre autres, la silhouette d’une femme portant un foulard. Il a fallu que le planning familial saisisse la justice pour casser cette décision.
Le cas de Poitiers est plus grave. La ville et l’agglomération ont accordé des subventions pour un festival consacré à la transition écologique. Le préfet a dénoncé ces subventions en arguant qu’un atelier sur la désobéissance civile y était organisé. L’affaire a été portée au tribunal administratif qui doit rendre son jugement dans le courant du mois de février. « Nous attendons toutes et tous avec impatience la décision du tribunal administratif qui pourrait constituer un précédent » précise Thierry Abaléa, président du mouvement associatif en Bretagne. Elle aura des conséquences pour les associations, mais aussi pour les élu-es qui accordent des subventions. » En effet, on peut considérer qu’il s’agit d’une atteinte au principe de l’autonomie des collectivités qui pourraient voir leurs délibérations remises en cause par les préfets, sur la base de notions comme le trouble grave à l’ordre public.
« Le cas ne s’est pas encore présenté mais une autre disposition de la loi nous inquiète », prévient Thierry Abaléa. « En effet, le texte oblige les associations à faire connaître, à tous leurs adhérents, leur contrat républicain d’engagement. C’est-à-dire qu’aucun adhérent n’est censé l’ignorer. Par conséquent, dans l’hypothèse où quelqu’un contreviendrait à l’un des 7 articles du contrat d’engagement républicain, l’association à laquelle il adhère, pourrait être considérée comme responsable et pourrait perdre ses subventions voire ses agréments. »
La lutte contre le séparatisme n’est pas remise en cause par le mouvement associatif qui prend d’ailleurs toute sa part pour promouvoir les valeurs de la République.
Cependant, si le discours officiel se veut rassurant, des clarifications doivent être apportées rapidement. Ça va sans dire que le mouvement associatif doit être soutenu et que les collectivités locales doivent continuer à l’accompagner, comme elles l’entendent. Mais, compte tenu des récents événements, ça irait mieux en le disant.
Pour leur part, le Mouvement associatif ainsi que le Réseau national des maisons des Associations (RNMA) le Collectif des Associations citoyennes (CAC), les têtes de réseau associatif (France nature Environnement, Éducation Populaire, Défense des droits humains, égalité Femmes Hommes,….) demandent l’abrogation du CER et rappellent que les Chartes d’Engagement Réciproques offre un cadre de respect et de reconnaissance bien plus favorable.
En savoir plus : le mouvement associatif
Le contrat d’engamant républicain
ENGAGEMENT N° 1 : RESPECT DES LOIS DE LA RÉPUBLIQUE
Le respect des lois de la République s’impose aux associations et aux fondations, qui ne doivent entreprendre ni inciter à aucune action manifestement contraire à la loi, violente ou susceptible d’entraîner des troubles graves à l’ordre public.
L’association ou la fondation bénéficiaire s’engage à ne pas se prévaloir de convictions politiques, philosophiques ou religieuses pour s’affranchir des règles communes régissant ses relations avec les collectivités publiques.
Elle s’engage notamment à ne pas remettre en cause le caractère laïque de la République.
ENGAGEMENT N° 2 : LIBERTÉ DE CONSCIENCE
L’association ou la fondation s’engage à respecter et protéger la liberté de conscience de ses membres et des tiers, notamment des bénéficiaires de ses services, et s’abstient de tout acte de prosélytisme abusif exercé notamment sous la contrainte, la menace ou la pression.
Cet engagement ne fait pas obstacle à ce que les associations ou fondations dont l’objet est fondé sur des convictions, notamment religieuses, requièrent de leurs membres une adhésion loyale à l’égard des valeurs ou des croyances de l’organisation.
ENGAGEMENT N° 3 : LIBERTÉ DES MEMBRES DE L’ASSOCIATION
L’association s’engage à respecter la liberté de ses membres de s’en retirer dans les conditions prévues à l’article 4 de la loi du 1er juillet 1901 et leur droit de ne pas en être arbitrairement exclu.
ENGAGEMENT N° 4 : ÉGALITÉ ET NON-DISCRIMINATION
L’association ou la fondation s’engage à respecter l’égalité de tous devant la Loi.
Elle s’engage, dans son fonctionnement interne comme dans ses rapports avec les tiers, à ne pas opérer de différences de traitement fondées sur le sexe, l’orientation sexuelle, l’identité de genre, l’appartenance réelle ou supposée à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion déterminée qui ne reposeraient pas sur une différence de situation objective en rapport avec l’objet statutaire licite qu’elle poursuit, ni cautionner ou encourager de telles discriminations.
Elle prend les mesures, compte tenu des moyens dont elle dispose, permettant de lutter contre toute forme de violence à caractère sexuel ou sexiste.
ENGAGEMENT N° 5 : FRATERNITÉ ET PREVENTION DE LA VIOLENCE
L’association ou la fondation s’engage à agir dans un esprit de fraternité et de civisme.
Dans son activité, dans son fonctionnement interne comme dans ses rapports avec les tiers, l’association s’engage à ne pas provoquer à la haine ou à la violence envers quiconque et à ne pas cautionner de tels agissements. Elle s’engage à rejeter toutes formes de racisme et d’antisémitisme.
ENGAGEMENT N° 6 : RESPECT DE LA DIGNITÉ DE LA PERSONNE HUMAINE
L’association ou la fondation s’engage à n’entreprendre, ne soutenir, ni cautionner aucune action de nature à porter atteinte à la sauvegarde de la dignité de la personne humaine.
Elle s’engage à respecter les lois et règlements en vigueur destinés à protéger la santé et l’intégrité physique et psychique de ses membres et des bénéficiaires de ses services et ses activités, et à ne pas mettre en danger la vie d’autrui par ses agissements ou sa négligence.
Elle s’engage à ne pas créer, maintenir ou exploiter la vulnérabilité psychologique ou physique de ses membres et des personnes qui participent à ses activités à quelque titre que ce soit, notamment des personnes en situation de handicap, que ce soit par des pressions ou des tentatives d’endoctrinement.
Elle s’engage en particulier à n’entreprendre aucune action de nature à compromettre le développement physique, affectif, intellectuel et social des mineurs, ainsi que leur santé et leur sécurité.
ENGAGEMENT N° 7 : RESPECT DES SYMBOLES DE LA RÉPUBLIQUE
L’association s’engage à respecter le drapeau tricolore, l’hymne national, et la devise de la République.