Peut-on imaginer certains quartiers ou certaines communes perdre leurs centres sociaux ? C’est pourtant ce qui risque d’arriver si ces structures, implantées depuis parfois plus de 100 ans ne sont pas aidées financièrement par les collectivités locales et surtout l’État, très rapidement. C’est pour alerter les pouvoirs publics, mais aussi l’ensemble de la population que le 31 janvier, la fédération nationale des centres sociaux a organisé plus de 40 rassemblements dans toute la France. Pour le Finistère, c’est place de la Liberté, à Brest, que plus de 300 personnes, salarié-es ou bénévoles de près de 30 structures de tout le département se sont retrouvées pour un moment festif et revendicatif.
Les subventions de l’État stagnent alors que les besoins explosent
Les subventions de l’État stagnent alors que les besoins explosent, notamment à cause de l’inflation. Mais aussi des augmentations de salaires. Compte tenu du niveau de rémunération, il fallait évidemment les revaloriser. Mais alors, il fallait aussi accompagner les centres sociaux, ce que l’État n’a pas fait.
Très concrètement, pour le centre social de Morlaix « Carré d’as », qui intervient dans les quartiers du nord et de l’est de Morlaix, deux postes sont menacés : celui de la médiatrice sociale et celui d’un conseiller numérique. Ailleurs, ce sont des activités qui ne peuvent plus être menées.
Dans le Finistère, s’ajoute aux difficultés que connaissent tous les centres sociaux de France, la crainte de voir se réduire les subventions du Conseil départemental dans les mois qui viennent. Déjà des signes avant-coureurs laissent craindre un désengagement. « Le Conseil départemental avait mis à notre disposition une salariée de la PMI (Prévention maternelle et infantile) 50 heures par an, pour qu’elle puisse intervenir dans le LAEP (Lieu d’Accueil Enfants Parents) » expliquent les responsables du centre social d’Ergué Armel à Quimper. « Sans prévenir, cette mise à disposition a été supprimée du jour au lendemain ».
De la même manière, la subvention au centre régional d’information jeunesse a été supprimée sans explication.
L’inquiétude est d’autant plus grande que le Conseil départemental du Finistère, pourtant toujours prompt à communiquer, ne laisse rien filtrer de ses intentions pour aider les centres sociaux.
Tous n’ont pas leurs finances dans le rouge mais aucun n’envisage l’avenir avec optimisme. « Ils doivent de plus en plus répondre à des appels à projets pour des missions » explique Jérémy Louis chargé de mission de la fédération des centres sociaux. Non seulement, ça demande beaucoup de temps pour remplir les dossiers, mais en plus ça ne donne pas de visibilité sur le long terme puisqu’il faut régulièrement postuler, avec le plus souvent des demandes d’innovation. Et, en plus, cette logique conduit des structures qui devraient coopérer, à entrer en concurrence les unes contre les autres ».
Notre mission, c’est de tisser du lien social
« Notre mission, c’est de tisser du lien social » poursuit Jérémy Louis. « Or, ça ne peut se faire que sur la durée, on a besoin d’avoir une vision à long terme. C’est pourquoi nous en appelons à la coresponsabilité ». Le lien social est l’affaire de tous, mairies, conseils départementaux ou régionaux, et surtout État. Les centres sociaux se sentent souvent isolés, en première ligne, pour assurer les missions que les services publics ne remplissent plus.
C’est pourquoi, la fédération nationale des centres sociaux réclame, très rapidement, une aide exceptionnelle, évaluée à 65 millions d’euros, pour aider les structures en difficulté.
Mais au-delà, elle en appelle à la coresponsabilité de tous les acteurs de la solidarité et du lien social.
Compte tenu des actions qu’ils mènent, les centres sociaux ne peuvent pas, comme souhaitent le faire croire les Libéraux, s’inscrire dans une démarche purement comptable. A combien peut-on estimer le lien social, l’entraide, la solidarité ? Et surtout, ne faut-il pas considérer les subventions accordées aux centres sociaux comme des investissements sur l’avenir ?
Réinventer le modèle économique des centres sociaux
« C’est pour cette raison que nous invitons le 7 mars, au CESE (Conseil Économique Social et Environnemental), tous ses partenaires pour réinventer le modèle économique des centres sociaux » explique Jérémy Louis. « Nous voulons aussi poser la question des communes ou des quartiers qui en sont dépourvus et trouver ensemble des solutions pour en implanter ».
Alors que certains d’entre eux existent depuis plus de 100 ans, les centres sociaux sont plus que jamais des acteurs du lien social et de la solidarité qu’il faut défendre et promouvoir.