Homme de compromis et de dialogue François Bayrou ? On ne demande qu’à le croire mais l’Histoire ne plaide pas en sa faveur. Même 30 ans après, personne n’a oublié son énorme fiasco de 1994, lorsqu’il avait tenté d’abroger la loi Falloux et n’avait réussi qu’à rallumer la guerre scolaire.
Depuis la fin des années 90, l’enseignement privé réclamait l’abrogation de la loi Falloux qui interdisait aux collectivités de financer les investissements dans les écoles privées. La droite RPR et UDF avait repris cette revendication dans son programme pour les législatives de 1993.
François Bayrou, ministre de l’éducation nationale dans le gouvernement Balladur présente donc, dès l’automne 1993 un projet de loi pour permettre aux collectivités locales de financer comme elles le voulaient les écoles privées.
Alors que le débat s’éternisait à l’Assemblée, Edouard Balladur tenta de passer en force en inscrivant le texte au Sénat et en faisant voter la loi, à la sauvette, dans la nuit du 14 au 15 décembre 1993. Ce coup de force eut deux conséquences : les parlementaires de gauche saisirent le Conseil Constitutionnel et le CNAL (Comité national d’action laïque) appela à une grande manifestation pour le 16 janvier 1994.
Cette manifestation, soutenue par le Parti Socialiste, rassembla plus d’un million de personnes, venues de toute la France et en particulier de Bretagne. Symboliquement, ce furent d’ailleurs les Bretons qui manifestèrent en tête du cortège. En effet, comme le rappelait le Breton Socialiste du 21 janvier 1994 : « Ce n’est pas un hasard si c’est notre région qui ouvrait le défilé. C’est en Bretagne que les établissements privés sont les plus présents : Dans le Morbihan, 48% des élèves fréquentent des écoles privées, 40,6% dans le Finistère, 39,8% en Ille et Vilaine et 33,4% dans les Côtes d’Armor. »
Il s’en est fallu de peu que cette manifestation soit annulée : en effet, trois jours avant, le Conseil Constitutionnel censura les principales dispositions du projet de loi. François Mitterrand, alors président de la République, choisit de la promulguer, vidée de sa substance, plutôt que de laisser à la droite la possibilité d’en présenter une autre. La mobilisation du 16 janvier 1994 fut donc un avertissement à l’intention du ministre de l’éducation pour qu’il ne tente plus de modifier les règles de financement de l’enseignement privé. 30 ans plus tard, gageons qu’il a retenu la leçon…