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Fière d’être une députée rurale 

Mélanie Thomin Finistère

L’équipe parlementaire

Il y a un an, Mélanie Thomin remportait face à Richard Ferrand l’élection législative dans la 6e circonscription du Finistère. A quelques jours de ce premier anniversaire, et juste après la triste séance parlementaire du 8 juin, elle nous explique les spécificités de cette législature, sans majorité absolue, et nous décrit le quotidien d’une députée d’opposition qui défend les services publics en zone rurale. 

Cap Finistère : Dans quel état d’esprit es-tu, après ta première année de mandat de députée ?  

Mélanie Thomin : Toujours aussi enthousiaste et motivée ! Je suis la seule députée d’opposition dans le département. Il est vrai que, sous la précédente législature, et même encore celle d’avant, tous les député-es étaient de la même tendance. Mais je dispose de la même légitimité que mes collègues. Et ce n’est pas parce que certains d’entre eux ne prennent jamais la parole que je vais me taire. J’ai été élue pour représenter le centre-Finistère et c’est ce que je fais au quotidien, avec l’ensemble des élu-es, des chefs d’entreprise et des associations.

Ça a du sens, pour une députée de choisir d’installer sa permanence dans une commune rurale comme le Faou

Cap Finistère : Comment t’es-tu organisée avec ton équipe pour exercer ton mandat ? 

Mélanie Thomin : J’ai choisi d’installer ma permanence parlementaire au Faou, c’est-à-dire au cœur de la circonscription, au croisement de la presqu’île de Crozon, du pays de Daoulas et du pays de Châteaulin. Je pense que ça a du sens, pour une députée de choisir une commune rurale comme le Faou pour installer sa permanence. Je l’avais promis pendant ma campagne et je m’y tiens : je suis la porte-parole du monde rural, trop souvent oublié.

C’est ici que travaillent mes collaboratrices, Nolwenn Quioc et Sonia Zamai et mon collaborateur Konwal Perrot. C’est ici aussi que je peux recevoir les habitant-es ou les associations en rendez-vous.
En outre, j’ai commencé à tenir des permanences mobiles, à Carhaix ou Lanvéoc. La prochaine se tiendra le 23 juin à Ouessant. En fonction de mon agenda, j’essaye d’en tenir une par mois. C’est important d’aller à la rencontre des habitant-es et d’être à leur écoute. Sans compter les déplacements sur le terrain à l’occasion d’inaugurations ou de manifestations sportives, culturelles ou artistiques. C’est là qu’on peut avoir un contact direct avec les habitant-es et qu’on peut se rendre compte de la vitalité du monde associatif.

Cap Finistère : Et à l’Assemblée Nationale ? 

Mélanie Thomin : Je me rends, en train, à l’Assemblée, en général, le mardi matin et j’y reste jusqu’au jeudi. Pendant l’examen de la loi sur les retraites j’étais un peu plus souvent dans l’hémicycle. La semaine commence par la réunion du groupe socialiste et apparentés le mardi matin, où nous examinons l’agenda législatif et nous procédons aux arbitrages. Le mercredi matin est souvent consacré aux auditions de la commission de la défense. J’ai également un collaborateur à Paris, Morgan Bougeard.

Le gouvernement et la présidente de l’Assemblée ont tout fait pour empêcher le débat

Cap Finistère : Comment as-tu vécu la séance du 8 juin, qui devait examiner la proposition de loi d’abrogation de la réforme des retraites ? 

Mélanie Thomin : Avec beaucoup de tristesse, bien sûr, lorsque nous avons appris le drame qui venait de se dérouler à Annecy.
Mais avec beaucoup d’amertume aussi puisque nous savions que se jouait, dans cette séance, le dernier acte d’un cycle qui avait débuté au mois de janvier. Tout au long de ce processus, la majorité présidentielle, ou devrait-on dire la minorité présidentielle, n’a eu de cesse d’étouffer le débat. On se souvient des deux semaines de discussions, qui se sont achevées, brutalement, un vendredi soir à minuit, sans que nous ayons pu voter sur l’article 7, qui faisait passer l’âge de départ en retraite de 62 à 64 ans. Ou du 49.3 dégainé au dernier moment.

Manifestation contre la retraite à 64 ans le 19 janvier à Carhaix

Le gouvernement et la présidente de l’Assemblée ont tout fait pour empêcher le débat et le vote. En tant que députée, je suis très attachée à la séparation des pouvoirs. Je crois que le camp présidentiel n’a pas bien compris que les électrices et les électeurs n’ont pas voulu lui donner tous les pouvoirs aux législatives de juin dernier. L’examen de la proposition de loi LIOT a été, de ce point de vue, un véritable scandale : cette proposition a été vidée de sa substance en commission.  Seul, un amendement du groupe socialiste a été retenu. Ont été maintenus tous les amendements de la majorité présidentielle Tous les autres ont été supprimés.

Nous avons voulu dire, par ce serment, que nous ne tournons pas la page

Cap Finistère : D’où le serment du 8 juin ? 

Mélanie Thomin : Nous avons voulu dire, par ce serment, que nous ne tournons pas la page. Nous reviendrons, à l’occasion de niches parlementaires, ou de l’examen de la prochaine loi de finances de la sécurité sociale, sur l’âge de départ en retraite.

Dans cette séquence, je crois que la présidente de l’Assemblée a perdu son crédit, auprès des oppositions, bien sûr, mais même aussi auprès d’une partie des député-es macronistes qui ont bien vu qu’elle obéit d’abord aux ordres de l’Élysée et de Matignon avant de défendre les prérogatives du Parlement. Je crois qu’elle aura du mal à retrouver sa crédibilité.
De notre côté, il faut souligner l’unité de l’intersyndicale et la solidité des liens que nous avons pu nouer, dans le respect de l’indépendance syndicale. Nous avons mené un combat commun et complémentaire. Cette expérience sera précieuse à l’avenir.

Guillaume Garot sera, dans le cadre du Tour de France des déserts médicaux, à Carhaix le 3 juillet. 

Cap Finistère : Tu avais beaucoup insisté, durant ta campagne, sur les enjeux de santé et, députée, tu es particulièrement active sur ces questions. Quelles sont, pour toi, les principales priorités dans ce domaine ?  Et comment se présente l’avenir de l’hôpital de Carhaix ? 
Mélanie Thomin : Oui, je suis très attentive à la situation de l’hôpital de Carhaix, ainsi qu’à celle de celui de Landerneau. Certes, il ne se situe pas sur ma circonscription mais les habitant-es du pays de Daoulas, ou de Châteaulin, le fréquentent. En outre, leurs problématiques sont semblables : des établissements de villes moyennes qui pâtissent du manque de praticiens et dont certains services sont menacés. Je rappelle que 47 femmes n’ont pas pu accoucher à Landerneau. Une fermeture temporaire de la maternité a de nouveau été programmée cette semaine. Les élu-es ainsi que les personnels ou les comités de vigilance, dans le pays du COB ou de Landerneau ont besoin d’être soutenus et accompagnés, quelle que soit leur orientation politique. En effet, il faut constamment mettre la pression sur le ministère pour qu’il accorde à ces hôpitaux les moyens de fonctionner. C’est d’ailleurs ce que j’ai fait mercredi à l’occasion d’une question au gouvernement et demandant à la première ministre où étaient passées ses promesses.

Questions au gouvernement sur la santé

L’hôpital de Carhaix mérite toute notre attention. En effet, dans ce secteur, l’hôpital est souvent le seul recours, en l’absence de clinique ou de praticiens en médecine de ville. L’arrêt de ses activités serait catastrophique pour l’ensemble du bassin de vie. En 2 ans, près de 30 % des lits ont été fermés. Le CHRU n’est pas inactif mais ses efforts pourraient être encore plus importants.

Le maintien des urgences est vital. Et je pense notamment à la période des Vieilles Charrues. Il n’est pas pensable, cet été, de réduire leur activité. Or, nous savons que des services sont en train de fusionner.

Il est donc urgent que le ministère rende plus attractives les professions hospitalières et prenne en compte les spécificités des hôpitaux en zones rurales.

Cap Finistère : Il y a aussi urgence à lutter contre les déserts médicaux.

Mélanie Thomin : Évidement. C’est une question qui revient régulièrement lorsque je m’entretiens avec les habitant-es de la circonscription, particulièrement concernés par ce phénomène. C’est l’objet d’une proposition de loi portée par Guillaume Garot. D’ailleurs le Tour de France des déserts médicaux fera escale à Carhaix le 3 juillet. Toutes celles et tous ceux qui sont intéressé-es par la question de l’accès aux soins, citoyen-nes, élu-es, professionnel-les de santé… sont invité-es à en débattre, en présence de Guillaume Garot, à 18h00, salle des Halles.

La défense des services publics en zone rurale est une bataille permanente. Mais c’est pour ça que j’ai été élue.

 

Cap Finistère : Tu t’es aussi beaucoup mobilisée sur les questions d’éducation. Comment juges-tu l’action du Pap Ndiaye ? 

Mélanie Thomin : Déjà, et je crois que l’immense majorité des enseignants et des enseignantes s’en réjouissent, Jean-Michel Blanquer ne dirige plus la rue de Grenelle. Mais la politique du ministère n’a pas fondamentalement changé à l’égard des personnels et des choix budgétaires. On a l’impression que des moyens ont été mis dans les CP des zones prioritaires mais au détriment des zones rurales. 60 classes vont être supprimées en Bretagne, dont 35 dans le Finistère et 9 dans la 6e circonscription, notamment dans des communes littorales. Je suis obligée de constater qu’il existe un lien entre les fermetures de classes et le prix des logements. Les familles avec enfants ne peuvent plus se loger dans certaines communes. Et donc, les familles modestes sont doublement pénalisées.

C’est pour cette raison que nous faisons des propositions pour limiter les locations saisonnières. L’État doit faire un effort pour maintenir les classes dans les zones rurales. En se mobilisant, on peut remporter des victoires, comme le maintien d’une deuxième classe de sixième au collège du Huelgoat.

Mais, comme en matière de santé, il faut toujours être vigilant et maintenir la pression. La défense des services publics en zone rurale est une bataille permanente. Mais c’est pour ça que j’ai été élue.

Il faut conserver un minimum d’enseignement général de manière à maintenir les passerelles entre les lycées professionnels et l’enseignement supérieur.

Cap Finistère : Que t’inspire la réforme du lycée professionnel ? 

Mélanie Thomin : Là encore, je constate que l’ensemble des organisations syndicales s’opposent à cette réforme. La question posée est la suivante : quelle est la place de l’enseignement général dans les lycées professionnels ? A terme, on court le risque d’un démantèlement des lycées professionnels. Tout le monde est d’accord pour un rapprochement avec les entreprises, mais pas au détriment des heures de cours. Sans compter qu’il ne suffit pas de dire aux lycéen-nes, allez faire des stages. Encore faut-il trouver des entreprises pour les accueillir. Il faut conserver un minimum d’enseignement général de manière à maintenir les passerelles entre les lycées professionnels et l’enseignement supérieur. Sinon, les jeunes seront freinés dans leur parcours scolaire.

Cap Finistère : Tu es membre de la commission de la défense. La loi de programmation militaire 2024/2030 permettra-t-elle de répondre aux nouveaux défis auxquels notre pays et l’Europe sont confrontés ? 

Mélanie Thomin : Nous nous sommes abstenus et j’ai présenté la position du groupe à la tribune. C’est assez rare, et donc il faut le souligner, le ministre de la défense, Sébastien Lecornu, a fait preuve d’ouverture d’esprit au cours de cette discussion et a accepté les propositions de l’opposition. L’un de mes amendements, sur la coopération des services de renseignement, par exemple, a été accepté. C’est pourquoi j’ai été assez surprise d’être prise pour cible par mon collègue, Didier Le Gac, membre de la commission des affaires sociales.  Je ne comprends pas en quoi notre abstention serait si grave. D’autant que, s’il avait écouté l’explication de vote que j’ai prononcée au nom du groupe socialiste, il aurait bien compris qu’il ne s’agit pas d’un vote contre les personnels de la défense. Au contraire.

Explication de vote sur la loi de programmation militaire

Nous nous sommes abstenus, parce qu’il y a beaucoup d’effets d’annonce dans cette loi de programmation. Le gouvernement annonce une augmentation de 30% du budget de la défense pour un montant total de 413 milliards d’euros. Mais quand on regarde en détail, comme l’a fait notre collègue Valérie Rabault, on constate que l’effort n’est pas si massif que cela. On est loin de la loi de programmation historique qui été annoncée.

Ensuite, nous aurions voulu, dans ce moment de tensions, avec la guerre en Ukraine et les rivalités grandissantes entre les grandes puissances, une stratégie plus claire de la part de la France. Or, le ministre n’a pas voulu préciser notre stratégie, comme certains de ses prédécesseurs l’avaient fait avec des livres blancs de la défense. On ne voit pas bien comment engager et prioriser nos coopérations au niveau européen. Nous constatons aussi des baisses de capacité, tant pour les chars que pour les frégates. Nous ne pouvions donc pas voter cette loi de programmation.

Nous allons lancer cette commission d’enquête dans un esprit constructif et de dialogue avec les agriculteurs.

Cap Finistère : Quel est l’objectif de la commission d’enquête parlementaire sur les produits phytosanitaires

Mélanie Thomin : Je suis la deuxième signataire de cette commission avec Dominique Potier. Le groupe Socialiste a le droit de lancer une commission d’enquête par session. Ce n’est donc pas anodin qu’il ait choisi de traiter ce sujet. Cette commission d’enquête traite des « causes de l’incapacité de la France à atteindre les objectifs des plans successifs de maîtrise des impacts des produits phytosanitaires sur la santé humaine et environnementale ». J’ai cosigné cette demande parce que je pense que la question de la qualité de l’eau est essentielle. Nous allons lancer cette commission d’enquête dans un esprit constructif et de dialogue avec les agriculteurs. D’ailleurs, Dominique Potier est lui-même issu du monde agricole. Notre objectif est de comprendre pourquoi l’État français qui a pris des engagements, notamment avec Stéphane Le Foll sous le quinquennat de François Hollande, n’arrive pas à les faire respecter.

Cap Finistère : Tu as publiquement apporté ton soutien à Erwan Chartier, rédacteur en chef du Poher hebdo, menacé de mort suite à un reportage sur une manifestation d’extrême-droite à Callac. Sens-tu une progression de l’extrême-droite en Bretagne ? Ou ce genre de comportements restent-ils marginaux ?

Mélanie Thomin : Malheureusement, les idées d’extrême-droite se banalisent de plus en plus. Nous sommes encore un peu épargnés en Bretagne même si les menaces envers les élu-es, mais aussi envers les militant-es associatifs, se multiplient, et il faut, à chaque fois les dénoncer, ne surtout pas s’y habituer : il n’est pas acceptable de s’en prendre à des élu-es ! La Bretagne a été, est, et doit rester une terre d’accueil.

Rassemblement de soutien au Poher le 25 février 2023

Cap Finistère : Comment se passe la cohabitation, au sein de l’Assemblée avec les député-es du RN ? 

Mélanie Thomin : Il faut toujours être vigilant. Il faut reconnaître que les député-es du RN maîtrisent parfaitement leur communication et ont très rapidement adopté les codes de la vie parlementaire. Ils et elles sont très urbains et aimables. Et très présent-es. Mais, au quotidien, dans leurs prises de parole ou leurs amendements, on voit bien qu’ils et elles restent d’extrême-droite. Par exemple, dans le domaine social, ils cherchent systématiquement à défendre la priorité nationale. Pour la politique étrangère, ils remettent régulièrement en cause nos alliances internationales et font tout pour mettre en difficulté nos coopération européenne en matière de défense.

Avec la présence de ces 89 député-es, et l’absence de majorité absolue, on voit bien que cette législature est, à tous les égards, inédite, mais aussi déterminante pour l’avenir.

Vous pouvez joindre la permanence parlementaire de Mélanie Thomin par téléphone au 06 59 38 14 58 ou par mail  melanie.thomin@assemblee-nationale.fr.

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